L’entreprise française Kyotherm s’est vu remettre le SHC Solar Award pour le programme « Solar Heating and Cooling (SHC) » de l’Agence Internationale de l’Energie, à Santiago du Chili, le 7 novembre dernier.

Objectif de ce prix : promouvoir et développer la recherche collaborative autour du solaire thermique et surtout mettre en valeur des innovations propices au développement de ce marché.

Nous sommes allés à la rencontre de Daniel Mugnier, président du programme Solar Heating and Cooling (www.iea-shc.org) afin d’en savoir plus.

 

SOCOL : Le SHC Solar Award, de quoi s’agit-il ?

Daniel Mugnier : A l’occasion de la dernière conférence Solar Heating and Cooling (SHC), il a été proposé de soutenir des mécanismes exemplaires de financement et de montage de projets solaires thermiques. Kyotherm est un tiers-financeur solaire thermique pour des installations de grandes tailles. Son modèle est adaptable dans de nombreux pays dans le monde et il est en train de réaliser la plus grande installation solaire thermique pour l’industrie en Europe avec une malterie française basée à Issoudun (environ 15 000m² de capteurs solaires).

Une vingtaine de pays constituant les membres du programme SHC étaient en compétition. Ceux-ci ont présélectionné des candidatures nationales (l’ADEME ayant été en charge de ce travail pour la France). Dix ont été soumises à un comité, dont Kyotherm et Newheat pour la France.

Ce comité, composé de représentants de pays membres sélectionne des projets sur des critères de qualité, de réplicabilité et d’excellence (https://www.iea-shc.org/solar-award).

 

SOCOL : En quoi la solution proposée par Kyotherm s’est-elle démarquée ?

Daniel Mugnier : C’est la reproductibilité du mécanisme de financement proposée par Kyotherm qui a fait la différence. Cette entreprise a acquis un vrai savoir-faire sur comment développer des projets en mettant en concurrence des acteurs du solaire. C’est un organisateur-financeur qui fait la liaison entre les banques et un projet. Il organise ensuite la conduite du projet, sa maintenance pour un client final auquel sera vendu de la chaleur sur à une période longue, généralement 20 ans.

Son originalité : s’allier pour un projet donné, avec les meilleurs. Il fait appel à de l’expertise ponctuelle. Il a une connaissance fine des mécanismes de financement et s’adapte aux projets solaires thermiques qui sont très divers.

L’objectif de Kyotherm, dont le nom s’inspire sans doute en partie de Kyoto et de thermique, est d’atteindre les objectifs fixés dans l’accord de Kyoto à travers le verdissement de la fourniture de chaleur. Il s’agit donc de financements pour la géothermie, la biomasse ainsi que du solaire.

 

SOCOL : Quel impact sur la filière internationale ?

Daniel Mugnier : C’est la preuve par l’exemple. On peut développer des projets solaires thermiques de manière rentable sur des installations de plusieurs milliers de mètres carrés. Cela est possible, moyennant une politique incitative nationale, avec le Fonds Chaleur pour la France en coup de pouce.

 

SOCOL : Et en France ?

Daniel Mugnier : La France n’est pas à la traîne, elle est même dans le peloton de tête sur le tiers-investissement chaleur. Ces mécanismes financiers innovants se retrouvent dans des pays comme les Etats-Unis, les Pays-bas, l’Allemagne, L’Autriche et la France. On a des champions français, il faut le savoir et le crier fort, comme Kyotherm, Newheat ou Sunti.

Notre atout est d’avoir des appels à projets réguliers pour des installations qui alimentent ce type de mécanismes, permettant ainsi une montée rapide en compétence et donc un avantage concurrentiel à terme.

Il y a d’autres pistes pour ce genre de modèles d’affaires, Kyotherm démarche l’Afrique du Nord ou l’Amérique du Sud par exemple. De même, des entités comme Newheat ou SUNTI également ne restent pas les bras croisés dans l’Hexagone et préparent de très beaux projets en dehors de nos frontières, dans des contrées où le gisement solaire est encore bien meilleur et où l’énergie à substituer à plus onéreuse.

 

SOCOL : Le mot de la fin ?

Daniel Mugnier : Une idée qui germe dans les esprits de nombreux acteurs en France et à l’international dans le solaire thermique réside dans le fait qu’il faudrait développer un mécanisme incitatif de type bonus ou encore par analogie avec le monde du PV de type FiP (Feed-in-Premium). En France, ce complément de rémunération pourrait être naturellement abondé par le Fonds Chaleur. Cela permettrait de complémenter la rémunération, des entités comme un tiers-financeur sur la foi de la production consommée de chaleur solaire. C’est un mécanisme simple et efficace, très peu bureaucratique qu’on essaie de promouvoir et de mettre en place malgré les difficultés crées par la gestion d’un tel mécanisme et sa coexistence avec les règles de gestion des aides imposées par Bruxelles.

Ce serait une suite potentielle à ce prix et à l’initiative puisque cette idée de mettre en place un complément de rémunération a été imaginée par Arnaud Susplugas et moi-même lors de nos différents échanges en marge de la conférence SHC.

C’est vraiment un élément important qui manque actuellement à la filière. La filière n’a pas besoin forcément d’aide à l’investissement plus important mais surtout de visibilité sur son financement. De plus, elle est mature en 2020 pour aller vers cette aide à la performance.

Le tarif d’achat bonifié est un mécanisme très connu dans le monde du photovoltaïque. Il s’agit donc d’être plus agile et imaginatif sur les méthodes de financement du solaire thermique.